Depuis plusieurs mois, je travaille sur un projet qui me tient à cœur depuis des années. Il s’agit d’un roman graphique sur une femme qui entre en maison de retraite. Réussir à m’y mettre et y consacrer du temps est déjà pour moi un exploit. Si vous suivez ce blog, pas besoin de vous faire un dessin (<- BLAGUE !) : je ne suis pas la plus confiante des "artistes" (<- guillemets ! J'arriverai un jour à les enlever), et je suis freinée par tout un tas de kettle bells parmi lesquelles une profonde haine de soi, un sentiment de culpabilité permanent, trop de sensibilité et un cerveau qui mouline tellement dans tous les sens qu'il est possible qu'un jour il explose. Malgré tout ça, j'ai donc entrepris ce projet, et je devrais déjà en être fière. Mais il est très éprouvant. Il me confronte à des choses que je redoute et que j'ai soigneusement évité de regarder en face jusqu'à présent. Il m'amène à rencontrer des gens qui souffrent et qui luttent, en vrac et sans exhaustivité, contre : leurs propres limites physiques et psychiques, contre le manque de sens, contre leurs regrets, contre le temps qui passe, contre le manque de moyens, contre leurs peurs, contre une société qui ne les veut que s'ils correspondent aux critères esthétiques et de performance qu'elle impose à tous (« OH YEAH, UNE MEUF DE 98 ANS QUI ENSEIGNE LE YOGA !! AH OUI, MONTREZ-MOI ÇA !!… Par contre c’est bon, je veux pas la voir ta grand-mère en fauteuil qui se chope un bleu quand on lui fait la bise et qui s’exprime plus que par « AAAAH ! AAAAAH ! »).
Parfois, je me dis que je suis à deux doigts d’en tomber, tant ça me chamboule. Je suis là dans mon lit, je regarde dans l’abysse et je me dis « Mais pourquoi tu fais ça ? Pourquoi tu te fais du mal comme ça ? Tu ferais mieux d’arrêter. Tu ferais mieux d’aller dessiner les fleurs. » Hier soir, j’étais prête à tout abandonner. Mais je ne peux pas. Je ne sais pas pourquoi, je ne peux pas m’arrêter. Ce que je vais faire, peut-être, c’est tenir un journal de bord. Ça m’aidera sûrement à métaboliser plus facilement ce que je vis au fil de ce projet, qui me ballotte sans arrêt entre émotions fortes et questionnements existentiels, mais qui, heureusement, me fait aussi parfois rigoler.
… Bon allez. Comme l’aurait dit ma grand-mère « Pète un coup, ça ira mieux. »
Je vous laisse avec cette bien jolie vidéo sûrement faite par des gens qui aiment aussi regarder les plantes pousser :